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les révolutions de 1917 à 1921
La boucherie de la guerre de 14-18 accouche d’un monde qui se révolte.

La boucherie de la guerre de 14-18 accouche d’un monde qui se révolte.

Il y a 25 ans, en Russie… Cronstadt

Il y a 25 ans, en mars 1921, en Russie, les marins de Cronstadt, l’aile marchante du prolétariat révolutionnaire de 1917, se soulevaient contre l’Etat capitaliste qui, après avoir été abattu par la révolution d’octobre 1917, s’était reconstitué sous l’étiquette "bolchevik" et "communiste". Et les prétendus "communistes", sous la direction de l’aile droite dirigeante du parti, noyaient dans le sang le soulèvement des marins révolutionnaires.

Depuis 25 ans le mouvement de Cronstadt a été calomnié par la plupart des "communistes" de différentes tendances, y compris beaucoup de ceux qui se disaient de "gauche". Les documents ont été cachés par ces mêmes "communistes", et bien peu sont encore parvenus entre nos mains  ; mais ils nous suffisent pour rétablir la vérité dans ses grandes lignes.

Les staliniens et les trotskistes ont prétendu que le mouvement de Cronstadt était un soulèvement contre-révolutionnaire, mené par les impérialismes. Les bordiguistes eux-mêmes (tout au moins la tendance officielle), tout en critiquant comme une "erreur" l’écrasement sanglant du mouvement, ont considéré que l’Etat qui se livrait à cette répression était encore un Etat prolétarien, et que le parti qu la dirigeait était encore un parti "communiste", le parti du prolétariat...

La réalité est que les marins de Cronstadt se sont soulevés contre le capitalisme d’Etat, contre la bourgeoisie qui, sous une nouvelle étiquette et sous de nouvelles formes, réinstallait sa domination économique et politique sur les travailleurs ; contre un gouvernement qui, depuis 1918, n’avait cessé d’apporter des restrictions à l’exercice de la dictature du prolétariat, remplacée peu à peu par la dictature d’une bureaucratie toute puissante. Ils se sont soulevés contre le parti "bolchevik", ou plutôt contre son aile droite dominante, parc que celle-ci avait trahi le prolétariat et la révolution.

Il ne s’agissait pas d’un "secteur arriéré du prolétariat", comme le prétendent staliniens, trotskistes et bordiguistes, mais d’un secteur avancé. Loin d’être le résultat de menées contre-révolutionnaires, le mouvement de Cronstadt était le développement de "troubles" ouvriers, qui s’étaient produits dans les capitales de la Russie, et que l’Etat avait sauvagement réprimés. Les ouvriers de Moscou et de Petrograd avaient fait des grèves et des manifestations pour leurs revendications immédiates, pour le pain et contre l’absence de toute liberté. Les marins de Cronstadt ont voulu aller plus loin, vers la "3e révolution", vers une nouvelle révolution prolétarienne.

Dans ce but, les délégués de toutes les organisations ouvrières, de soldats et de marins de Cronstadt se sont réunis et ont formé un Comité Révolutionnaire chargé de gérer les affaires de la ville, de diriger le mouvement, de préparer de nouvelles élections au Soviet... Ce Comité Révolutionnaire comprenait beaucoup d’anarchistes, mais aussi bien des communistes de gauche, qui rompaient avec le parti "bolchevik" et se solidarisaient avec le mouvement. Les déclarations de ces communistes de gauche étaient si nombreuses que le journal édité par le Comité Révolutionnaire n’avait pas assez de place pour les publier toutes.

Cela nous indique suffisamment que l’ensemble du parti bolchevik n’était pas complice de la politique de trahison de la tendance de droite qui dominait le parti. Encore peu de temps après la répression de Cronstadt, la droite a dû faire adopter la décision d’interdire les fractions au sein du parti (ce qui ne s’était jamais vu dans le parti bolchevik) pour écraser la tendance de gauche de l’"Opposition ouvrière", dont les dirigeants ont été déportés.

Mais pour ce qui est de la droite "bolchevik" et de ses dirigeants — Lénine, Trotski, Staline — qui avaient été en 1917 à l’avant-garde de la révolution — son rôle dans la répression du mouvement de Cronstadt marque d’une façon définitive et éclatante son passage au service de la bourgeoisie. Pour nous la destruction du mouvement de Cronstadt marque la fin de la révolution prolétarienne en Russie, la fin de l’Etat ouvrier, et même la mort du parti bolchévik en tant que parti du prolétariat.

Certes le mouvement de Cronstadt est plein de formules confuses, et, dans la situation de 1921, qui était une situation générale de recul du prolétariat dans le monde, il ne pouvait pas avoir de perspective d’avenir immédiate et ne pouvait être qu’un dernier soubresaut de la révolution. Même s’il n’avait pas été écrasé dans le sang, il n’aurait pas pu amener à la victoire du prolétariat, car il lui manquait un parti de classe conscient qui lui donne des directives justes. Ce parti ne pourra naître que dans la prochaine montée révolutionnaire, et en tirant les leçons de toutes les expériences du prolétariat, et en particulier du soulèvement de Cronstadt et de sa répression. Mais, malgré tout, le mouvement de Cronstadt était un mouvement du prolétariat qui s’est dressé contre les traîtres qui lui volaient sa révolution.

Et cela nous suffit pour proclamer, 25 ans après, face à tous les calomniateurs traîtres ou centristes :

GLOIRE ET HONNEUR À CEUX DE CRONSTADT QUI SONT MORTS POUR QUE VIVE LA RÉVOLUTION PROLÉTARIENNE !